Tous d'accord ?

Florilège des raisons pour lesquelles nous serions tous d’accord. Et les raisons pour lesquelles je ne suis pas d’accord.

Photo Adrià Tormo - Unsplash

Il y a 15 jours, lors des Etats généraux de la communication, nous avons appris que les marques, publicitaires, médias, ont la même vision de demain et que celle-ci ne passe pas par la « stricte interdiction de la publicité ».

Pourtant, au sein des communicants, des voix s’élèvent en faveur d’une interdiction de certains types de publicités.

Voici un florilège des raisons pour lesquelles nous serions tous d’accord. Et les raisons pour lesquelles je ne suis pas d’accord.

L'intention n'est ici aucunement de minimiser les efforts déjà entrepris par beaucoup, mais de rappeler l'urgence à transformer la communication.

Les messages publicitaires participent à la transition

A quelle hauteur, au regard des discours publicitaires qui n’y participent pas ? 1% peut-être ? D’un côté, on interpelle les individus sur le dérèglement climatique, sur les limites de la planète, sur les changements de comportements à opérer. De l’autre on les abreuve de messages publicitaires faisant la promotion du bonheur par la consommation. Tant que les premiers messages seront moins audibles que les seconds on ne pourra pas affirmer que la publicité est vertueuse.

Trop d’emplois et de revenus sont en jeu, et la crise liée à la pandémie nous impose de relancer l’économie

Justement, profitons-en pour relancer l'économie sur de bonnes bases... une économie solidaire, durable, résiliente pour répondre à l'urgence écologique. La publicité pourrait en profiter pour suivre ce chemin et ainsi offrir aux jeunes diplômés des emplois dignes de leurs aspirations. Il s'agit de transformer la valeur ajoutée et non la réduire.

En publicité les interdictions sont toujours contre-productives

On m'a toujours dit que la créativité (l'essence même de notre métier) se nourrissait de contraintes ?

La publicité n’est que l’outil au service de la marque, du produit, on se trompe de coupable

Se cacher derrière ses clients, en voilà une idée originale. Alors quand on créé une campagne de communication en faveur de la transition écologique, on fait notre part, on est beau, on est bien. Par contre quand on fait une publicité pour un produit qui pose un problème écologique ou sanitaire majeur, on n'est pas coupable. Comme dirait mon fils : « trop fac’ ! » (prononcer « fass' » )

Il ne faudrait pas étouffer encore plus les médias qui subissent déjà une crise

Parlons-en des médias, là aussi c’est tout un système à réformer justement. Vaste chantier, tout aussi vaste que celui de la communication si ce n’est plus ! Au passage, certaines rédactions seraient ravies de voir des publicités plus en lien avec leurs propos.

Interdire des publicités est liberticide

Pour moi ce qui est liberticide c’est vouloir empêcher nos enfants de vivre dans un habitat viable. On a régulé la publicité pour l’alcool ou le tabac pour la préservation de notre santé, pourquoi il serait liberticide de vouloir nous protéger des dégâts à venir (déjà là en fait) ? À moins qu’il soit question de revenir sur la loi Évin (et Sapin ?!) également, là on entre dans la cour des grands (la Cour européenne des droits de l’homme d'ailleurs).

On a le système le plus contraignant au monde

C’est drôle, on dirait un argument tout droit sorti d'un guide anti-greenwashing, mais dans la catégorie "erreurs". Parce qu'en vrai, ce n’est pas parce qu'on est mieux que les autres qu'on est bien et qu'on a de quoi s'en féliciter.

D'ailleurs si le rapport Publicité et transition écologique montre en effet (p25) que les règlementations internationales resteraient limitées et qu'aucun dispositif ne vise spécifiquement l’action climatique ou pour la biodiversité, il précise également qu'aucune enquête n'a porté sur une analyse détaillée des pratiques d’autorégulation dans chaque État de l'UE.

Enfin, si on regarde côté publicité et alimentation, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la Cour des Comptes et plus récemment Santé Publique France ont non seulement fait le constat de l’inefficacité de l’autorégulation, mais ont aussi appelé à une loi pour empêcher la promotion des aliments les plus riches.

L'auto-régulation, ça fonctionne (mais ok on va voir pour améliorer le dispositif)

Tiens, on en parlait déjà pendant le Grenelle de l’environnement (2007). Il avait été demandé à l'époque de remplacer le BVP par une autorité administrative indépendante dotée d’un réel pouvoir de sanction. Remplacement du BVP ok (devenu ARPP et consorts). Autorité indépendante, loupé. Réel pouvoir de sanction, loupé. Mais sinon cette fois-ci on va s'améliorer, l’ARPP va demander à ses adhérents d’arrêter des décisions pour leur propre auto-régulation. Youpi, nous voilà rassurés. Et puis, comme le système est de toute façon efficace, pas de mouron à se faire!

Nous ne sommes pas en retard sur la stratégie nationale bas carbone, nous sommes sur le bon chemin. Nous avons d'ailleurs accéléré sur la transition écologique grâce à de nombreux engagements et nous allons encore nous engager

Le secteur de la com’ est donc en bonne voie pour remplir les objectifs des Accords de Paris ? Ça serait bien le seul, chapeau bas ! Possible de connaître les projections ?
Mais comme on est là aujourd'hui, à devoir se justifier (notamment sur un beau plateau TV) c'est peut-être que des engagements ne suffisent pas/plus ?

À celles et ceux qui ne sont pas d'accord avec cet accord annoncé, venez en discuter sur le groupe Communication Mutation - lien externe !